Troisième Embrunman consécutif, celui où j'espérais faire un chrono mais cette année encore le sort en a décidé autrement. Malgré une préparation minimaliste en natation, les sensations étaient plutôt bonnes ce qui m'a été confirmé par 37mn au premier tour et 1h15 en sortant, mon meilleur temps sur Embrunman !
C'était bon signe en vue des 188km de ma discipline favorite... La première montée est comme d'habitude bondée de spectateurs, j'attaque par un weehling d'une main, la foule est en délire, je savoure puis je me calme un peu le cardio étant déjà dans le rouge. Je gère la montée de la route des Puy, je descends bien puis je passe au rond point d'Embrun avec 6mn d'avance sur mon plan de marche.
Tous les voyants sont au vert, je n’ai pas chopé un virus 5 jours avant l'épreuve comme en 2014, la confiance est là, je me dis que les 13h30 envisagées sont pour moi cette année. Il me faut faire 7h15 à vélo soit 15mn de mieux qu'en 2013, j'ai gagné 30mn sur les cyclosportives de distances identiques, c'est tout bon !
Mais au km 52, un bruit suspect m'interpelle, mon dérailleur se brise, la chaîne traine par terre, je m'arrête, pas de réparation possible, mais je peux malgré tout toujours pédaler doucement. Tempête sous mon casque, il me reste 136km à parcourir dont l'Izoard, j'abandonne ? Je pense rapidement aux conséquences négatives, ne pas passer la ligne avec ma femme et mes enfants, ne pas faire parti des « finisher » lors de la fête du soir et du lendemain, pas de massage à l'arrivée, pas de frites, pas de bières… De toute façon « abandonner » ne fait pas parti de mon vocabulaire, donc il va falloir trouver une solution.
Je décide de tout faire pour aller au bout. Je pense réparer dans un cycle à Guillestre, mais c'est interdit par le règlement, assistance extérieure interdite. J'ai deux vitesses qui fonctionnent bien, le 34x30 idéal pour l'Izoard, le Pallon, le Chalvet et le 50x24 idéal pour les faux plats montants jusqu'à 30km/h. Je peux faire une croix sur les descentes et toutes les parties roulantes où je gagne d'habitude 300 places.
J'arrive tant bien que mal en haut de l'Izoard avec une dizaine de minutes de retard sur mon planning mais l'objectif n'est plus le chrono, je souhaite juste boucler mon troisième Embrunman. Il pleut, il fait froid, je puise un peu de force dans les encouragements du public et des copains au bord de la route, je remets calmement ma chaîne à chaque fois que ça déraille, patience...
Temps vélo en 2013, 7h30, en 2014 avec virus 7h45, en 2015 avec dérailleur cassé, 8h20 ! Je reviens chaque année plus fort en vélo mais ça ne se voit pas. L'année prochaine je ne reviens pas car à ce rythme, je pourrais finir en 9h avec bras cassé…
La transition s'effectue pour le mieux avec deux étudiantes en kiné qui s'occupent de mes muscles meurtris par les braquets imposés. C'est toujours un moment délicieux !
Le moral remonte, j'attaque le marathon à 10 km/h. Je m'arrête un instant pour embrasser ma femme et mes enfants. J'alterne marche et course à pied en gérant les douleurs. Les kilomètres passent un peu plus vite et le plan d'eau se dessine à l'horizon. Il reste 3km, la densité de la foule augmente jusqu'à la dernière ligne droite. Ma femme et mes enfants sont là et m'accompagnent pour finir ce troisième Embrunman ! Cette année, ma fille est assez grande pour courir. Ma femme porte le second alias l'enclume. Je savoure, c'est le bonheur ! Même si avec 14h43, le chrono restera anecdotique.